La situation socio-économique actuelle fait basculer bon nombre de travailleurs et de travailleuses qui avaient, avant la crise, des jobs relativement précaires mais qui leur permettaient de rester à flot jusqu’à la fin du mois. Aujourd’hui, avec la fermeture de l’horeca et des espaces de diffusion culturelle, c’est un pan entier de la société qui se retrouve sans ressources financières.  Quid des étudiants étrangers, qui sont piégés à cause du Corona et des cohabitants?

Cette question a été posée le 27 janvier 2021

Question de Marie-Colline Leroy à Karine Lalieux (Pensions et Intégration sociale) sur « Le nouveau public qui fait appel aux aides du CPAS » (55011054C)

Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):
Madame la ministre, la situation socio-économique actuelle fait basculer bon nombre de travailleurs et de travailleuses qui avaient, avant la crise, des jobs relativement précaires mais
qui leur permettaient de rester à flot jusqu’à la fin du mois. Aujourd’hui, avec la fermeture de l’horeca et des espaces de diffusion culturelle, c’est un pan entier de la société qui se retrouve sans ressources financières. Des budgets ont été débloqués pour ce public et les CPAS sont appelés à prendre le relais et à répondre aux appels à l’aide. C’est une très bonne chose. Mais ils sont limités par des balises qui sont sans doute, en cette période particulièrement complexe, trop limitatives.Je souhaite évoquer deux situations qui me sont
parvenues via des témoignages auxquels, je vous l’avoue, je ne pouvais pas vraiment répondre.
La première, c’est le fait de devoir résider en Belgique depuis trois ans. Cette règle met de facto en marge des aides beaucoup d’étudiants résidant en Belgique, principalement français. Or, ils ne peuvent demander une aide dans leur pays d’origine puisqu’ils n’y vivent plus. Ils ne peuvent pas non plus en demander une en Belgique. C’est en tout cas ce qu’on leur a dit. Envisagez-vous de faire une exception temporaire pour ce public, étant donné le caractère ubuesque de sa situation? Ils ne peuvent retourner dans leur pays
puisqu’ils étudient ici. Ils ont été acceptés dans nos universités, académies, hautes écoles au prix parfois d’un long parcours administratif. Ils sont là depuis six mois, un an, voire un peu plus mais pas encore trois ans.

La deuxième situation concerne la cohabitation qui est très régulièrement un frein aux aides.  Que mettez-vous déjà en oeuvre pour éviter qu’une cohabitation dite « non solidaire » (étudiants, frères et sœurs, amis, etc.) n’impacte et ne creuse les difficultés budgétaires des citoyens et des citoyennes?

Karine Lalieux, ministre:

Madame Leroy, votre première question m’étonne un peu. Pour pouvoir bénéficier du droit à l’intégration sociale, plusieurs conditions doivent être remplies:-être majeur ou assimilé à un
majeur;

-ne pas disposer de ressources suffisantes;

-faire valoir ses droits en vertu de la législation sociale belge ou étrangère;

-résider en Belgique;

-une condition de nationalité: être belge, apatride, reconnu réfugié, bénéficiaire de protection subsidiaire, être citoyen de l’Union européenne ou un membre de sa famille qui l’accompagne ou le rejoint bénéficiant d’un droit de séjour de plus de trois mois (et non pas de trois ans) en Belgique ou être un étranger inscrit au registre de la population.

Il n’est nulle part question d’une condition de résidence de trois ans en Belgique. Dès lors, un étudiant étranger dans le besoin peut s’adresser au CPAS pour obtenir une aide quelconque.  Deux conditions doivent être réunies pour qu’il y ait cohabitation en matière de droit à l’intégration, à savoir vivre sous un même toit et régler en commun les
questions ménagères. S’il ressort de l’enquête sociale du CPAS que ces conditions sont réunies, c’est le taux de cohabitant qui est à octroyer.
Dans le cas contraire, c’est le taux de personne isolée.  Le problème de la cohabitation est connu de tous depuis longtemps, et de nombreuses initiatives ont vu le jour ces dernières années. Par ailleurs, un meilleur accès au droit ne se traduit pas seulement par une valorisation des montants mais doit également passer par l’examen des conditions pour y avoir accès. C’est pourquoi l’accord de gouvernement prévoit d’examiner si la réglementation sociale et fiscale est encore adaptée aux formes actuelles de vie en commun et/ou de soins et de choix de chacun.  Il ressort d’une analyse de dossiers individuels que certains CPAS n’appliquent pas le taux de cohabitant quand des étudiants vivent sous le même toit, mais cela dépend d’une décision dans l’autonomie de gestion des CPAS. En outre, une enveloppe de 115 millions d’euros a été débloquée pour la création d’un « subside covid-19 » afin de permettre aux CPAS d’octroyer avec beaucoup plus de souplesse des aides de première nécessité à la population la plus précarisée, dont les étudiants font bien évidemment partie.

Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):
Madame la ministre, je vous remercie vivement pour ces réponses.   Je ne vous cache pas que je suis soulagée d’entendre votre réponse à la première question, car je n’avais pas
trouvé cette information lors de mes recherches. Je souhaitais dès lors l’entendre de votre bouche.  Par ailleurs, ce sont les raisons qui ont été invoquées pour refuser l’octroi, et je pense qu’il est important de pouvoir retourner vers ces publics pour leur dire que nous sommes d’accord et qu’il n’existe pas de conditions relatives à la cohabitation. Je pense comme vous que le travail que nous nous sommes engagés à fournir pendant cette législature va s’avérer essentiel au cours des prochains mois et années, et je vous remercie pour votre engagement sur ce plan.