La question a été posée à Frank Vandenbroucke le 17 mars 2021 suite aux résultats d’une enquête menée par Solidaris (https://www.institut-solidaris.be/wp-content/uploads/2021/02/Infographie_Thermo_SecuriteSociale_vf.pdf)

L’entièreté de la séance parlementaire peut être consultée  ici : https://www.lachambre.be/doc/CCRA/pdf/55/ac411.pdf

Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):

Le sondage Solidaris montre que nos concitoyens sont très attachés à la sécurité sociale, mais s’inquiètent pour son avenir. Les Belges perçoivent l’État comme de plus en plus défaillant dans sa mission de protection sociale.

  • Quel regard portez-vous sur cette enquête?
  • Que dites-vous aux 80% des sondés qui s’inquiètent de voir le coût des soins de santé augmenter, leurs allocations de pension diminuer et l’accès aux allocations de chômage conditionné et difficile?

Une personne sur deux estime qu’une part importante de la société ne participe pas assez au financement de la sécurité sociale. Le gouvernement est-il prêt à ouvrir le débat là-dessus?

Frank Vandenbroucke, ministre (en français):

Je comprends les inquiétudes sur l’évolution de notre système de protection sociale, dans le contexte actuel difficile. Je compte y répondre au cours de cette législature. Le virus touche notre vie en général. Ce n’est qu’en étant solidaires que nous pourrons surmonter cette période. La sécurité sociale a été construite pour être une bouée de sécurité.

Dans l’enquête, plus de deux tiers des gens la perçoivent de cette façon, mais un tiers des gens se sentent moins bien protégés et craignent de basculer dans la précarité. Ils ont peur que la sécurité sociale perde sa force de protection.Je veux les rassurer. La sécurité sociale doit rester cette bouée de secours, aujourd’hui et pour l’avenir. Je veillerai à ce que ceci puisse se réaliser via des mesures concrètes.Dans notre pays, la quasi-totalité de la population est couverte par l’assurance soins de santé obligatoire (1% seulement de notre population n’est pas couverte, d’après l’OCDE). Des mesures visant à améliorer l’accessibilité des soins de santé ont été prises, comme l’intervention majorée de l’assurance, le maximum à facturer, le tiers payant social, le dossier médical global, le statut affection chronique, etc.

Malgré cela, certains accèdent difficilement aux soins. Cela est lié au non-usage des droits, entraînant des difficultés. Ceci est parfois dû à un déficit d’information.Il faut mettre l’accent sur la communication et l’automatisation là où c’est possible, comme l’organisation récente d’un flux permettant aux mutualités d’identifier les bénéficiaires potentiels de l’intervention majorée de la subvention en santé. Le flux est instauré par l’arrêté royal du 26 mars 2020.  Pour l’assurance indemnités, depuis le 1erjanvier, on a instauré une indemnité minimale à partir du cinquième mois d’incapacité et non plus du septième. Dès 2024, l’indemnité sera octroyée dès le début de l’incapacité. Avant cela, un isolé avec un salaire brut de 1700 euros retombait à 908 euros net. Avec l’introduction du minimum, il aura 1150 euros. Un budget de 170 millions est prévu pour cela.

Pour l’instant, l’effet de l’allègement est peu visible car il existe une indemnité covid qui aligne son montant sur celui du chômage temporaire corona mais, à la fin du chômage temporaire corona, les salariés seront soutenus par cette mesure.  Un budget pluriannuel inédit de 2,16 milliards d’euros alloué d’ici 2024 augmentera les prestations les plus faibles vers le seuil de pauvreté.  Les principales dépenses sont de 1,182 milliard net –après un retour d’impôt de 35%–pour l’augmentation des pensions minimales, en combinaison avec les indexations intermédiaires. En supposant une augmentation annuelle de l’enveloppe bien-être de 1% d’ici 2024, le montant sera de 22,6% en plus qu’en 2020. Les aides sociales –GRAPA, revenu d’intégration, allocation de remplacement –seront majorées de 10,75%, en plus des indexations et des enveloppes bien-être–dont un quart par an. Cela représente 22,3% en plus d’ici 2024 et respectivement 193 millions, 162 millions et 126 millions d’euros. Il faut y ajouter 35 millions pour la suppression du prix de l’amour.

Les allocations de chômage minimales seront augmentées –quatre fois de 1%, équivalent à 127 000euros –en plus de l’indexation et de l’enveloppe bien-être pour un coût total de 134millions d’euros.  Le tarif social de l’électricité sera étendu en 2021 et 2022 pour un montant de 88 millions d’euros. De plus, je veillerai à ce que la réintégration sur le marché du travail se déroule dans les meilleures conditions, grâce à une approche multidisciplinaire et en concertation avec les acteurs. La sécurité sociale pourra être adaptée pour tenir compte des nouvelles formes de vie commune.  Les dotations d’équilibre de la sécurité sociale ont été prolongées au-delà de 2020 pour garantir l’équilibre financier et les prestations sociales.

La nécessaire modernisation de la sécurité sociale se fera avec les partenaires sociaux. Le financement durable et équitable de la sécurité sociale fait partie intégrante de cette réflexion. Je prévois des mesures dans le domaine de la santé visant à renforcer la protection sociale: nous mettons l’accent sur l’accès pour tous et une bonne couverture, tout en garantissant la qualité. Nous renforçonsl a prévention et le soutien aux malades chroniques. Avec les entités fédérées, nous comptons revaloriser les soins de première ligne. On prévoit un investissement accru structurel dans le personnel hospitalier et une réforme structurelle du financement des hôpitaux. Je veux poursuivre notre longue tradition d’assurer une protection sociale pour tous. Avec toutes les parties concernées, je veux rétablir la confiance en notre système de sécurité sociale et assurer son existence future.

Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):

Je remercie ceux qui ont mené et participé à l’enquête de Solidaris.  Vous rappelez les engagements pris. L’enquête démontre le manque de transparence sur le fonctionnement de la sécurité sociale et ce qu’il est possible de demander à un État-providence soucieux de sa population. Il est important que les mesures évoquées fassent l’objet d’une communication. Depuis le début de la crise, je suis interpellée par des personnes en difficulté. Le fait de lister les démarches possibles permet souvent de répondre à certains besoins. Essayons d’éviter que les personnes ne tombent, car il est alors difficile de les relever. Le principe de l’équité doit prévaloir. Les personnes perdent confiance dans le système social à cause d’un sentiment d’injustice.