Question parlementaire à Pierre-Yves Dermagne,Ministre du travail.

09.01 Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):

Monsieur le ministre, je voulais vous questionner sur le dossier de santé professionnel lié au service de médecine au travail, plus précisément sur la transmission des informations en cas de changement d’entreprise. Il en va de même pour le départ à la retraite, vers le médecin traitant ou tout spécialiste, n’importe quand dans la vie du travailleur.
D’après les principes généraux du Code du bien- être au travail, le dossier de santé du travailleur constitue la mémoire des informations pertinentes concernant un travailleur et permet au conseiller en prévention et/ou au médecin du travail d’exercer la surveillance de la santé.
Des collectifs, dont celui des victimes de l’amiante, nous interrogent sur l’obligation de transmission de ce dossier professionnel vers le nouveau conseiller en prévention en cas de changement d’entreprise mais aussi vers le médecin traitant du travailleur.

En effet, nous savons tous qu’une contamination par des substances nocives a des chances de se révéler quelques années plus tard.
Aujourd’hui, le transfert des données fonctionne selon l’appréciation du conseiller en prévention et/ou à la demande explicite du travailleur. Monsieur le ministre, comment, dès lors, sans historique de santé professionnelle, faire le lien rigoureux entre une contamination et une maladie qui survient vingt ans plus tard?
Que se passe-t-il, exactement d’une entreprise à une autre en cas de changement d’employeur?
Les informations se transmettent-elles automatiquement? Y a-t-il des informations qui se transmettent systématiquement du médecin de l’entreprise vers le médecin traitant ou vers tout
autre spécialiste? Estimez-vous que la mécanique de transmission actuelle est efficace? Pouvez-vous quantifier le nombre de dossiers qui sont effectivement transmis?

09.02 Pierre-Yves Dermagne, ministre:

Madame la députée, le Code du bien-être au travail prévoit un certain nombre de dispositions qui facilitent l’échange ou le transfert du dossier de santé du travailleur et de certaines données de ce dossier. Toutefois, l’échange de données du dossier de santé et le transfert d’un dossier de santé individuel nécessitent toujours le consentement préalable du travailleur concerné. Si un employeur change de service externe de prévention, celui-ci doit transférer tous les documents, y compris les dossiers de santé, à l’employeur ou au nouveau service externe de prévention dans les trois mois qui suivent le changement de service externe afin d’assurer la continuité du service.
Si un travailleur change d’employeur, il n’y a actuellement pas de transfert automatique.
Toutefois, si le médecin du travail du nouvel employeur constate qu’il existe un dossier de santé pour ce travailleur dans une autre entreprise, il est tenu, sous réserve du
consentement du travailleur concerné, de demander le transfert du dossier de santé au service de prévention de cette entreprise. Le médecin du travail du service de prévention de
l’ancien employeur est, pour sa part, tenu de donner suite à cette demande, soit en transférant les documents, soit en fournissant une copie conforme des dits documents.
Depuis 2019, le Code impose bien au médecin du travail de transmettre systématiquement le dossier de santé au médecin traitant du travailleur à chaque fois que celui-ci quitte l’entreprise, notamment en cas de licenciement ou de départ volontaire mais aussi lors de la pension. Cela permet un meilleur suivi de l’état de santé du travailleur puisque les données du dossier de santé, y compris les données d’exposition, sont conservées au même endroit quelles que soient les évolutions de carrière du travailleur.
En outre, le médecin du travail peut, s’il l’estime nécessaire, transmettre les données du dossier de santé au médecin traitant du travailleur, chaque fois que ce dernier a été en contact avec lui dans le cadre de la surveillance de la santé.
Cela peut être le cas lors d’une évaluation de santé au cours de laquelle des valeurs anormales sont observées, dans le cadre d’une visite préalable à la reprise du travail ou encore lors d’une consultation spontanée.
À mon avis, les mécanismes de transfert du dossier de santé ou des informations sur l’état de santé du travailleur prévus par le Code du bien-être au travail sont suffisamment efficaces. Ces mécanismes garantissent un transfert fluide des informations nécessaires tout en respectant le secret médical. Ils veillent à ce que les informations sur l’état de santé du travailleur soient conservées à l’endroit le plus approprié et à ce que le médecin traitant ait un meilleur accès à certaines données sur l’état de santé du travailleur lié à son contexte de travail.
Enfin, je tiens à vous informer que mon administration ne dispose pas de chiffres relatifs au nombre de dossiers de santé qui sont transférés chaque année entre les différents
médecins.

09.03 Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):

Mercimonsieur le ministre. Il y a là un dédale d’informations que je comprendrai, à mon avis, en relisant plusieurs fois vos réponses, non pas parce que vous n’avez pas été clair mais parce qu’il s’agit d’un sujet extrêmement complexe.
Sur la question du consentement, je pense que, depuis que nous avons voté cette loi qui offre une protection contre la discrimination en matière de santé et qui précède le travail actuel, cela pourrait avoir du sens. Je me demande pourquoi il n’y aurait finalement pas de consentement, si ce n’est pour des raisons parfois un peu problématiques de ne pas vouloir mentionner, à juste titre, par crainte de discrimination, une situation de santé.
Je pense que le manque de données pose un autre problème qui est de ne pas pouvoir observer un espace, une zone géographique au sein desquels il y aurait un suivi systématique des dossiers de santé. Néanmoins, je comprends bien que le RGPD est une nécessité et passe toujours par là.
Je relirai donc vos réponses car il me semble qu’il y a une volonté d’automatisation, ou en tout cas de facilitation, et je pense que c’est vraiment très important pour ce dossier en particulier.

L’incident est clos.