Les questions ont été posées le 09/02/21 à Pierre-Yves Dermagne (VPM et Ministre Économie et Travail)
https://www.lachambre.be/doc/CCRI/pdf/55/ic372.pdf
Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):
Monsieur le ministre, suite au dernier Codeco, le silence assourdissant à l’égard des travailleurs et des travailleuses des Arts n’a pas laissé le secteur indifférent. Et c’est un euphémisme.Depuis leur capacité de résilience aujourd’hui reconnue de toutes et tous, des représentant.e.s de ces travailleurs et travailleuses vous ont adressé un courrier. À vous mais aussi premier ministre et aux membres du gouvernement compétents.
Ainsi l’UPAC-T vous a demandé des garanties supplémentaires pour soutenir ce secteur touché comme jamais. Je reprends ici strictement leurs propos. Par respect tout d’abord. Mais également parce que je soutiens mot pour mot ces propos. Monsieur le ministre, l’UPAC-T vous dit: « Vous ne pouvez ignorer que les décisions du Codeco aggravent encore les graves conséquences économiques et sociales subies par les travailleur·se·s du secteur en impactant directement leurs revenus et leurs conditions de vie. Le chômage temporaire “événements annulés » n’a plus qu’un effet marginal parce que les événements ne sont même plus prévus par les organisateurs. Après dix mois de crise, les mesures de la loi du 15 juillet ne sont plus suffisantes! Il convient donc de les revoir afin de compenser financièrement cette perte de revenu rapidement et rétroactivement depuis le premier confinement.
- Avez-vous eu l’opportunité de prendre connaissance de ce courrier?
- Avez-vous répondu à cette interpellation?
- Quelles sont vos options et propositions à l’égard de ce secteur qui a véritablement besoin de réponses dès aujourd’hui et ne peut plus se contenter d’attendre encore et encore?
Nous sommes dans l’urgence, monsieur le ministre.
Pierre-Yves Dermagne,ministre:
Madame la présidente, madame la députée, je ne vous apprends rien en vous disant que, depuis de nombreuses années, le statut d’artiste pose une série de problèmes quant à son application. En conséquence, de nombreux travailleurs de la création artistique n’y ont pas accès, qu’ils soient artistes, techniciens et porteurs de projets. La crise du coronavirus a mis cette réalité en lumière parfois dramatiquement. Pour apporter une première solution imparfaite, mais nécessaire, à l’initiative de votre Parlement, une loi a pu être adoptée offrant une protection supplémentaire aux travailleurs et travailleuses du secteur qui sont les plus vulnérables.
En tant que ministre du Travail, j’ai fait en sorte que les mesures de crise soient prolongées pour assurer l’accès au chômage temporaire de la manière la plus simple et la plus rapide possible. Comme vous, je suis particulièrement attentif à toutes les difficultés auxquelles ces travailleurs doivent faire face. Avec l’ONEM et les organismes de paiement, je veille à y apporter systématiquement les solutions qui s’imposent. En ce qui concerne le statut, le gouvernement s’est engagé à améliorer et à dégager un budget pour financer cette amélioration. C’est essentiel pour moi. L’amélioration du statut se fera en concertation avec les travailleurs du secteur et les partenaires sociaux. Au nom du gouvernement et de mes collègues concernés, j’assure ces concertations. Mon cabinet a des contacts réguliers avec le secteur culturel très actif dans cette réforme. Vous les avez entendus lors des auditions. Diverses propositions nous sont déjà parvenues. Nous ferons prochainement la synthèse de ces contributions et sur la base des travaux menés par votre assemblée, nous organiserons une rencontre avec les différents acteurs. Je désire que cette invitation soit la plus inclusive possible, ouverte à toutes les fédérations du secteur.
Ensuite, nous formerons un groupe de travail en veillant à ce que toutes les disciplines et tous les types de travailleurs et travailleuses, artistes ou techniciens, soient bel et bien représentés. J’ai l’espoir de vous présenter des propositions concrètes dans le premier semestre de cette année.Par ailleurs, nous travaillons avec les Régions et les Communautés sur la situation des travailleurs de la culture. En collaboration avec les différents niveaux de pouvoir, un cadastre des aides culturelles a été réalisé et publié sur le site www.culture.be.Par ailleurs, j’ai bien reçu le courrier de l’UPAC-T et je leur ai proposé une rencontre dans les jours qui viennent. Je reste très attentif à la situation des travailleurs du secteur culturel en cette période de crise, comme je l’évoquais à l’entame de ma réponse. La fermeture des lieux de rencontre et des lieux culturels ne me fait pas plaisir. Comme tout le monde, j’ai hâte d’aller voir un spectacle ou une pièce de théâtre, ou d’assister à un concert.
Cependant, nous savons que nous devons encore rester prudents dans les semaines qui viennent.Je suis bien évidemment conscient que d’autres mesures sont nécessaires. Comme je l’ai évoqué en réponse aux questions sur le gel de la dégressivité, le gouvernement envisage actuellement différentes mesures de soutien complémentaires aux secteurs et aux personnes fragilisées par la crise. J’ai fait des propositions relatives aux travailleurs du secteur culturel, et j’espère pouvoir bientôt revenir vers vous pour vous détailler le contenu et la portée de ces nouvelles mesures.
Marie-Colline Leroy (Ecolo-Groen):
Merci, monsieur le ministre. J’aimerais revenir sur quelques éléments, dont la loi du 15 juillet. Il nous revient régulièrement qu’en fait, il n’y a pas énormément de personnes qui en bénéficient réellement et de manière aussi large que nous le pensions au moment où le texte a été rédigé.
Cette situation s’explique par deux éléments.
- Premièrement, peut-être cette loi devrait-elle être revue et adaptée?
- Deuxièmement, comme vous l’avez souligné, la difficulté administrative que constitue cette loi est peut-être un frein à la sollicitation de ce soutien complémentaire.
Il pourrait donc être intéressant de prolonger cette loi –ce que nous souhaitons vivement parce que nous pensons qu’elle a du sens–et de veiller à assurer un accompagnement administratif, notamment à l’adresse des caisses d’allocations de paiement. Je pense que cela pourrait leur être utile. Pour les avoir rencontrées, je peux vous dire qu’elles ont déployé toute l’énergie pour tenter de réguler une arrivée massive de demandes. Toutes les parties concernées par ce dossier se trouvent dans une situation compliquée. En ce qui concerne les rencontres, la synthèse des contributions, les informations au premier semestre et le cadastre, ce sont tout autant d’éléments que je tiens à souligner pour leur caractère extrêmement positif. Nous travaillons et nous progressons, car j’ai l’impression que tout le monde met la main à la pâte et que nous pouvons atteindre notre objectif. Je vous remercie vivement pour votre contribution également. Pas plus tard que ce matin, une demande a été faite afin que nous puissions vous rencontrer, vous et les ministres Vandenbroucke et Clarinval, pour un échange de vues.J’aimerais revenir sur le renouvellement du statut d’artiste. L’année 2021 allant avancer plus vite que ce que nous imaginons, pourquoi ne pas envisager une automatisation de ce renouvellement du statut pour tous ceux qui l’ont obtenu en 2020. Cela faciliterait sans doute la tâche et le travail des caisses de paiement, sachant que le renouvellement est aujourd’hui subordonné à la preuve de trois prestations. En raison de la situation extrêmement compliquée que nous vivons aujourd’hui, pourquoi ne pas considérer que 2021 est une année blanche pour ce qui concerne le renouvellement du statut?Enfin, quand il sera question de reprise –et on parle de plus en plus du printemps culturel auquel tout le monde aspire–, il faudra prévoir une période tampon ou une période transitoire avec des mesures transitoires afin de ne pas abandonner du jour au lendemain les travailleurs et les travailleuses. Je vous exhorte à le faire, monsieur le ministre, mais je suis convaincue que vous veillerez à ce qu’il en soit ainsi. J’ajoute que le même genre de question a été évoqué pour le droit passerelle, ce matin, avec le ministre Clarinval. Avant de terminer mon intervention, je voudrais demander aux interprètes de bien vouloir m’excuser car j’ai parlé très vite ayant beaucoup de choses à dire.